Le Projet KARIBU, comme une évidence

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Allah Mohammad, 16 ans, est arrivé en France avec son frère aîné en 2017. L’an dernier, l’équipe de Tandem cherchait une activité qui pourrait convenir à son âge et lui a proposé de rejoindre un mouvement scout.

Tandem a appris que les Eclaireuses et Eclaireurs Unionistes de France avaient déjà accueilli de jeunes exilés.

En 2017, pour faciliter l’intégration des jeunes exilés dans les troupes, les EEUdF ont rédigé un carnet d’accompagnement, le Projet KARIBU. Depuis, de jeunes « Kaributeurs » (des responsables unionistes) ont décidé de soutenir tout groupe scout désireux de recevoir un ou plusieurs jeunes exilés en son sein.

Le scoutisme permet une sociabilisation en faisant découvrir la vie de groupe à des enfants et adolescents d’une même tranche d’âge.

Le carnet d’accompagnement, consultable sur internet(*), donne des conseils aux accueillants pour établir une relation de confiance entre les différents participants. Il est par exemple proposé d’organiser, pour préparer les jeunes à l’interculturalité, un premier week-end jumelé avec une autre unité : ainsi tout le monde se « découvre », il n’y a pas de stigmatisation.

Est-ce grâce à ces conseils de base que tout se passe bien ? On peut le croire, car la dizaine de points abordés dans le livret répond parfaitement à la plupart des situations rencontrées et permet d’anticiper et de régler les éventuels problèmes.

Les accueillants peuvent aussi suivre une formation de deux heures.

Nous avons rencontré Paul Wat, coordinateur du projet et membre de l’équipe bénévole Karibu :

« En swahili, KARIBU signifie « accueil ». Le mot Karibu entre aussi en résonnance avec la thématique de la forêt et de la nature, qui est essentielle dans le scoutisme.

Les valeurs défendues dans le scoutisme sont l’ouverture à l’autre, le respect de la diversité et de l’écologie, la vie en commun. De plus, nos équipes encouragent la mixité sociale et genrée.

Il semble donc naturel d’accueillir des enfants et des jeunes de familles d’exilés. Cela permet de partager avec eux nos expériences et nos valeurs dans un contexte plus ludique que le milieu scolaire. »

Tout mineur est protégé par la convention internationale des droits de l’enfant (ONU 1989) qui garantit le droit aux loisirs et à une éducation sur le sol où il se trouve.

Les EEUdF n’ont donc pas de problème légal ou administratif pour accueillir un jeune exilé dans le cadre d’une activité de loisirs.

Rappelons ici que quoique d’origine protestante, le mouvement des Eclaireuses et Eclaireurs Unionistes de France est laïc et accueille tous les jeunes sans condition. Certains groupes proposent dans leur projet d’année une initiation à la démocratie participative.

Le projet KARIBU a déjà accueilli depuis deux ans une soixantaine de jeunes entre 8 et 19 ans.

Paul explique : « Allah Mohammad nous a rejoints depuis le printemps dernier : il est présent à chaque weekend que nous organisons une fois par mois.

Nous allons toujours en forêt, dans un endroit proche de Paris et nous partons avec un projet pédagogique bâti autour d’un thème comme la diversité, la vie en commun, la nature ou l’écologie… L’été dernier, nous avons organisé pour les 12-16 ans un camp d’été de trois semaines dans le Perche, et tout s’est très bien passé. »

Il poursuit : « Il n’y a jamais de problèmes de compréhension linguistique car les enfants vont à l’école et apprennent le français. De plus, ils sont à un âge où ils apprennent très vite. C’est toujours surprenant !

D’une manière générale, l’accueil des enfants exilés se fait très simplement et naturellement : ce sont des enfants comme les autres et ils s’intègrent parfaitement bien dans le groupe. »

Marion, qui a été directrice d’un camp jumelé de deux groupes de la région parisienne, rejoint le témoignage de Paul : « Nous sommes toujours contents d’accueillir des nouveaux, qui sinon ne partiraient pas en vacances. La dimension « exilés » est au final un plus. Elle permet à tous, encadrants et enfants, de se rappeler que ce sont juste des jeunes, et de dédramatiser l’image véhiculée par les médias et par notre société ».

Laissons parler Allah Mohammad : « J’aime beaucoup les activités scoutes et surtout le camp d’été. J’ai plein d’amis là-bas. La vie aux scouts me rappelle ce que je faisais dans mon village d’Afghanistan. Et puis j’aime chanter. Les chants sont beaux et les paroles me plaisent. En fait j’aime tout ! C’est ce que j’ai préféré de la France depuis que je suis arrivé en 2015. »

Comme une évidence… Si seulement les communautés des jeunes scouts pouvaient transmettre leur confiance et leur bienveillance à la société civile.

Propos recueillis par Sylvie

(*) http://bibli.eeudf.org/wp-content/uploads/2017/09/Dossier_karibu_web.pdf

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