Se former ou travailler : un choix quelquefois difficile

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Naudys, alternant en mécanique automobile

A Tandem, on sait combien il est difficile d’avoir une vie professionnelle intéressante sans produire le moindre diplôme. Surtout si on vient d’ailleurs…

Les accompagnateurs proposent donc spontanément une formation aux personnes réfugiées. En France il y a beaucoup d’opportunités : des dispositifs, des aides, des alternances, des formations courtes, des formations longues…

Oui mais… les freins à se lancer dans une formation sont puissants !

Les personnes que nous accompagnons sont le plus souvent issues de sociétés traditionnelles, où la précarité est ancestrale. Les persécutions personnelles ont aggravé le sentiment de fragilité. Quand la sécurité arrive avec la protection donnée par la France, il reste ce que la culture a laissé au fond de chacun : une forme d’injonction à agir pour aujourd’hui plutôt que pour un avenir improbable. « Aujourd’hui » est vécu comme une incertitude, « Demain » n’a pas de place. « Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ! » nous dit le dicton, pourtant bien français.

Dans ce contexte, comment faire le choix de se former ? La formation est, par essence, un investissement pour le futur. Il faut être convaincu que l’emploi sera meilleur après une formation. Mais le sentiment de sécurité, la confiance dans la promesse manquent trop souvent. Après avoir appris le français, pratiquement aucun d’eux n’envisage d’apprendre un métier. En revanche, tous rêvent d’avoir, enfin, un emploi !

D’autant plus qu’il faut se loger, ce que le RSA ne permet pas, et souvent envoyer de l’argent à la famille. Pourtant la formation, oui c’est important si on peut.

Pour des personnes qui ont passé 30 ans tout est plus compliqué, mais beaucoup sont plus jeunes. Il ne s’agit pas, bien sûr, d’entraver la liberté que chacun est venu chercher en France. Il s’agit de négocier avec ce que nous connaissons de notre organisation sociale (« Passe ton bac d’abord ! ») et le respect du désir des personnes que nous conseillons. Ce n’est pas sans frustration parfois pour les accompagnateurs.

Certains, heureusement, trouvent le courage de faire le pas en renonçant à gagner de l’argent tout de suite.

Yassir qui n’avait étudié qu’à l’école primaire, finit son CAP de menuisier en juin 2021. Il a pris goût aux études au point d’envisager une année supplémentaire pour devenir ébéniste ! Ce parcours n’a pas été sans effort ni pour lui, ni pour la bénévole qui l’a aidé tous les week-ends à découvrir notamment quelques notions de géométrie.

Sabir, désorienté quand il est arrivé à Tandem, a eu besoin de temps pour choisir. Il apprend maintenant avec la Croix Rouge Française le métier d’aide-soignant, un des emplois qui nous manquent tant !

Naudys prépare en alternance un CAP en mécanique automobile et Allah Mohammad un CAP d’électricien en internat.

Quant à Eva qui est arrivée en France à la fin du collège sans parler un mot de français, elle a commencé sa première année de médecine.

Certains de ces parcours ont nécessité un solide soutien financier. On peut remercier la fondation Astrolabe, qui a offert à Eva la prépa privée indispensable en complément de sa fac à Orsay pour espérer réussir son année. C’est aussi Astrolabe qui a financé une partie de l’internat aux Apprentis d’Auteuil pour Allah Mohammad.

Finalement, quand un jeune accepte de s’investir dans les études, n’est-ce pas déjà le signe de sa confiance dans l’avenir ? Une victoire qui annonce une intégration facilitée. C’est déjà « prendre racine » !

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